L'automne dernier, je suis allé voir l'exposition Miro' au Grand Palais.
Là, près du triptyque des bleu 1, 2 et 3, j'ai lu ce commentaire du peintre :
"Les toutes dernières oeuvres, ce sont les trois grandes toiles bleues. J'ai mis beaucoup de temps à les faire. Pas à les peindre, mais à les méditer. Il m'a fallu un énorme effort, une très grande tension intérieure pour arriver à un dépouillement voulu. L'étape préliminaire était d'ordre intellectuel... C'était comme avant la célébration d'un rite religieux."
Cela m'a rappelé une des leçons américaines d'Italo Calvino, consacrée à la rapidité. En toute fin de sa leçon, il termine par une histoire chinoise :
"Entre autres nombreuses vertus, Zhuangzi était habile en dessin. Le roi lui demanda de dessiner un crabe. Zhuangzi lui répondit qu'il avait besoin de cinq années et d'une villa pourvue de douze serviteurs. Au bout de cinq ans, il n'avait pas encore commencé le dessin. "Jai besoin de cinq autres années", dit Zhuangzi. Le roi les lui accorda. Au terme de la dixième année, Zhuangzi prit son pinceau et en un instant, d'un seul geste, dessina un crabe, le crabe le plus parfait que l'on eût jamais vu."
Le temps de la création est invisible est long, c'est celui de la méditation, de la formation lente, de la sédimentation.
Celui de l'exécution est court ; il est épousailles de l'esprit et de la forme.
Celui de l'admiration (ou de la récréation) est inexistant. C'est à peine une caresse fugace. Sitôt concédée, sitôt oubliée.
Commentaires