Lorsque, par le plus grand des hasards, je tombai sur ce livre étrangement intitulé "Austerlitz" de WG Sebald, j'étais loin de me douter que sa lecture allait modifier ma perception du monde. Sur les pas de ce voyageur en quête d'élucider le mystère de son nom et de sa naissance, j'allais plonger dans une curieuse visite de monuments européens suintant la prétention et la mort : du Panthéon de Rome aux escarpes de l'enceinte de Saarlouis, de la coupole de la gare de Lucerne à l'escalier à double révolution de celle d'Anvers, j'allais arpenter des sentiers improbables menant au fort avancé de Breendonk ou aux camps de la mort. J'allais comprendre aussi en vrac, que l'architecture dit notre histoire à qui sait la regarder, que nos constructions sont le reflet de nos délires à l'allure raisonnable, que le chemin qui mène de l'innocente forteresse de Teresin au camp de Theresienstadt est creusé dans l'écheveau de nos compromissions et de nos faiblesses. J'y ai aussi compris pourquoi je n'aimais pas la blibliothèque François Mitterrand.
Trace et aura. Jacques Austerlitz marche sur les traces et la trame qui lient son patronyme marquant un lieu (la Moravie germanisée, la Mitteleuropa) et un écoulement temporel (dont le 2 décembre 2005 peut, le cas échéant, constituer une date inaugurale). Il dénoue dans la pierre et les ossuaires les conditions de son présent d'homme fait de la deuxième moitié du XXè siècle. L'aura, quant à elle, est plutôt apparition d'un lointain. Celle du futur que nous enfantons dans les fondations de nos constructions d'aujourd'hui.
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