Lu hier dans Libération un article de Haydée Sabéran sur le projet de construction d'une ville de rêves en terre de corons, à Hénin-Beaumont dans le Pas-de-Calais. A la carte : transformation d'un terril en piste de ski avec neige artificielle, création de toute pièce d'un lac de 300m de diamètre avec eau bleue garantie par la présence de sable blanc en son fond, création de 1200 logements sur le pont qui traversera le lac en de part en part, des églantiers pour faire venir les rossignols, un complexe aqua-ludique, un site pour cascadeurs amateurs & professionnels... La paradis, en somme, comme un raccourci audacieux entre le Fujiyama, Courchevel et le pont du Rialto.
Mais avant d'en arriver là, il faudra bien procéder à quelques opérations de préparation du terrain. Car le site qui doit abriter ce projet grandiose est celui-là même où siégeait il y encore quelques années ans une fonderie de Metaleurop, avant que la société ne dépose le bilan début 2003. Avec le dépôt de bilan et son cortège de licenciements, avait aussi eu lieu la révélation des méfaits d'une pollution par le plomb générée sur plus de 30 ans : vaches avortées, malformations diverses, enfants en retard, saturnisme...
Avant d'entrer de plain-pied dans une de ces représentations du paradis oisif & ludique que nous dépeignent les architectes du futur, il faudra faire table-rase des stigmates de la cité du XXè siècle toute entière vouée au culte du travail et de la transformation industrielle.
Au XXè siècle, le galibot au fond de sa mine est devenu apprenti fondeur. Aujourd'hui, il est chômeur ; il a quitté les corons, vit dans une barre HLM avec vue sur l'autoroute et la ligne de train à grande vitesse. Se doute-t-il, devant le spectacle hallucinant des véhicules qui passent inlassablement sur la A1, que demain, ses enfants dameront le pion aux savoyards en descente du Super G de Hénin-Beaumont ?
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