Quand j'étais étudiant en école commerciale -- cela remonte à plus de vingt-cinq ans, un bail -- les cours étaient organisés autour de 2 grandes filières : la finance et le marketing. Paradoxalement, je n'ai pas souvenir d'avoir suivi ou noté l'existence du moindre cours sur la vente ou autour des différents savoir-faire ou compétences qui y sont traditionnellement associés : négociation, justification de valeur, gestion de clientèle, etc.
A partir de demain et pour une durée d'une semaine, je m'en vais donner un cours de vente à l'attention des élèves de 3ème année d'une grande école d'ingénieurs.
Alors, qu'est-ce qui a changé entre temps ? Un article paru dans le Wall Street Journal la semaine dernière, signé par Ronald Alsop, éclaire sur ce phénomène étrange qui voit la vente faire une entrée discrète, non seulement dans les programmes des écoles commerciales, mais aussi dans celui des écoles d'ingénieurs.
Ainsi, aux Etats-Unis, de plus en plus d'universités inscrivent des cours de vente dans leurs programmes de niveau MBA. Au MIT, par exemple, l'introduction du cours "La vente de hautes technologies et le management commercial" (N° 15.396, animé par Kenneth Morse) fait suite au constat réalisé par de nombreux fondateurs de jeunes pousses (start-ups en anglais) comme quoi leur plus grande difficulté ne résidait pas tant dans le développement des nouvelles technologies que dans leur commercialisation.
David Godes, professeur titulaire à Harvard, regrette de son côté que "trop de personnes considèrent encore la vente comme une activité tactique et ne parviennent pas à voir que les compétences requises pour être un bon vendeur sont essentielles y compris dans des domaines autres que le commercial." Après avoir pendant de nombreuses années assuré un cours de management commercial, Harvard a depuis peu élargi l'éventail des formations de vente proposées aux étudiants avec des modules autour de la gestion de processus de vente, l'art d'influencer les décisions d'achat, la pratique de la négociation etc.
Enfin, de leur côté, les employeurs saluent avec satisfaction cette évolution. Irene DeNigris, directeur du recrutement chez Johnson & Johnson affirme sans ambages que "si les universités et écoles de commerce mettaient des contenus liés à la vente dans leurs programmes de MBA, cela rendrait les diplomés plus compétitifs". Toujours selon elle, "la compréhension des connexions entre vente et marketing devient désormais essentielle".
Sur ce dernier point, une étude récente de prospective sur les métiers de la vente et du marketing (1) coordonnée par Luc Boyer, directeur de recherche à l'université Paris-Dauphine montre que 81% des professionnels interrogés estiment qu'à terme, le marketing opérationnel sera de plus en plus intégré à la direction commerciale. Après tout, ces deux fonctions ne partagent-elle pas une finalité identique : établir, faire vivre et maintenir une relation avec la clientèle ?
Alors que d'aucuns nous considèrent déjà sortis de la société de l'information pour entrer dans celle de la connaissance, le savoir-vendre deviendrait-il ce que le savoir-faire était au temps de la révolution industrielle ?
A suivre...
(1) La présentation de cette étude a donné lieu à la publication d'un papier dans Le Monde du 6 décembre 2005 intitulé "Et si la vente et le marketing ne faisaient qu'un..." et signé par Nathalie Quéruel.
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