A chaque fois que mes pas m'ont conduit sur la frange méditerranéenne du Moyen Orient, j'y ai été frappé par la beauté douce des paysages et la fragrance de l'air où se mêlent et se confondent les effluves de la mer et celles du désert. Alors que la guerre fait rage aujoud'hui dans cette contrée du monde, j'emprunte à Albert Cossery le titre de ce notule. Albert Cossery est à mon sens l'une des plus belles voix vivantes de la littérature française. Ami de Camus, il partage avec lui l'idée que l'homme doit célèbrer au jour le jour des noces sensuelles avec la nature. Ecrivain égyptien, il dit avec une douceur exquise la victoire de l'amour physique & de l'oisiveté sur le travail, il met en garde contre cette propriété perfide des objets à déclencher des vils sentiments d'envie, il met en scène des personnages improbables -- mendiants ou oisifs -- qui, dotés pour seule arme d'un sens aigu de la dérision, font tomber le masque austère du pouvoir et son imposture permanente. Il nous prévient contre les méfaits de l'ambition, ses turpitudes, surtout pour qui a oublié de se laisser étourdir au quotidien par la beauté du monde qui s'offre à la lui. Ses livres sont des appels à la sensualité, une exhortation à l'amour, un cheminement vers la paix. Puissent nos belligérants d'aujourd'hui laisser un temps de côté leur arsenal de mort, s'immobiliser en silence et promener "un regard émerveillé sur toute cette beauté scintillante sous le soleil, comme une offrande à qui veut simplement vivre" (1).
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(1) in "Une ambition dans le désert" - Editions Joelle Losfeld, p.221
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