Hier, j'ai reçu une jolie lettre de ma mère. En guise de conclusion, elle cite une phrase figurant en épilogue du livre "Une brève histoire de l'avenir" de Jacques Attali :
"Je veux croire, qu'au-delà d'immenses désordres, la Beauté aura su héberger et protéger les ultimes étincelles d'humanité. On aura écrit et façonné des chefs d'oeuvre ; on aura découvert des concepts ; on aura composé des chansons. Surtout, on aura aimé. Et on aimera encore."
Ce mercredi, la beauté était à l'honneur. Dans l'édition du Monde datée de mardi, la révélation était faite de la découverte de fresques somptueuses à la basilique des Quatre-Saints-Couronnés à Rome. Jean-Jacques Bozonnet, l'auteur de l'article, cite l'avis d'experts selon qui ce serait une "véritable chapelle Sixtine médiévale" qui aurait été découverte et restaurée.
Comme en contre-point, ce même jour, dans une émission intitulée "Collectionneurs : l'art de la guerre" sur France Culture, Simon Guibert et Yvon Croizier retraçaient l'histoire du pillage du musée de Bagdad en avril 2003. Pendant les premiers jours qui suivirent la prise de la ville, les troupes américaines prirent soin d'assurer la protection de lieux sensibles. Un char fut immédiatement posté devant le Ministère du pétrole, mais il fallut attendre plusieurs jours avant que le musée de Bagdad ne pût jouir d'une semblable attention.
Indifférence ou négligence coupable ? Toujours est-il que les quelques jours de non-protection suffirent à organiser la mise à sac du musée, considéré jusque là comme l'un des plus grands sanctuaires de l'art sumérien.
Clair-obscur moderne : alors qu'une partie de notre patrimoine vient à la lumière à Rome, à Bagdad une autre a sombré dans l'obscurité des transactions marchandes plus ou moins occultes. Art qui rit ici, harakiri là-bas.
Dans un ouvrage étonnant intitulé "Architecture of happiness", Alain de Botton met en évidence les liens entre la beauté et la bonté divine. Dans l'islam comme dans le catholicisme, la beauté des édifices renvoie explicitement au Très-Haut ; elle est la bonté faite pierre. Il estime aussi que le protestantisme a rompu ce lien.
Le développement de l'éthique utilitariste dans les pays anglo-saxons viendrait-il de là, de cette perte de familiarité, ou à défaut de vénération du beau ?
Le beau, le bon... Mais au fait, qui est le truand ?
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