Celles et ceux d'entre vous qui m'entourent connaissent sans doute mon affection pour les éléphants. L'animal trônait dans mon salon du temps où je vivais à Courbevoie. A chacune de mes escapades romaines, je ne manquais pas d'aller faire un tour place de la Minerve pour le saluer, dans sa version baroque et porteuse d'obélisque. A force de plonger mon regard dans celui du pachyderme immortalisé par le Bernin, je croyais même parfois le voir me sourire. Plus récemment, alors que mon ami Gérald me demandait s'il pouvait me ramener quelque chose qui me fasse plaisir de son voyage en Sicile, je lui répondis du chocolat de Modica et une reproduction de l'éléphant thaumaturge de Catane. Ghislaine m'avait raconté il y a longtemps qu'il protégeait la ville des sautes d'humeur de l'Etna et que, depuis qu'il avait élu domicile au coeur de la ville, il s'acquittait plutôt bien de sa responsabilité puisqu'aucune lave incandescente n'était venue inquiéter les habitants.
C'est justement ça que j'aime chez l'éléphant. Son côté rassurant, force tranquille. J'aime son pas mesuré, sa cadence régulière et son allure débonnaire. Même quand il se donne une contenance toute militaire, il ne trompe personne.
Ce que j'aime moins en revanche, c'est qu'on mélange impunément un terme pour un autre. Récemment, la critique littéraire rendit un éloge unanime au "Voyage de l'éléphant", le dernier livre de José Saramago traduit en français. Tout cela est très bien. Pourtant, des commentateurs, sans doute soucieux d'éviter les trop nombreuses répétitions du mot "voyage", l'ont allègrement remplacé par "périple". Et c'est là que les choses se compliquent. Car si un voyage peut s'effectuer par n'importe quel moyen de transport, le périple, lui, induit irrévocablement l'idée de navigation maritime.
Ce ne seraient sans doute qu'arguties sans intérêt si les personnes autour de moi ne cessaient de me demander pourquoi j'ai quitté les rives de la Méditerranée et l'éléphant souriant de la Minerve pour parader sur le sable de Miami Beach.
Source : les murs du Miami International Airport
Déplacement, repérage, voyage, exil ? Chacun y va de son mot choisi. Pourtant, que diable, c'est bien un océan que j'ai traversé pour élire mon nouveau domicile. Alors, ça mérite bien le terme de périple ça, non ?
"La vie a beaucoup de cartes dans son jeu et il n'est pas rare qu'elle les joue quand on s'y attend le moins". La phrase est tirée justement du "Voyage de l'éléphant" de José Saramago. Et je trouve qu'en la circonstance, cette citation ne pouvait mieux tomber pour m'accompagner dans mon périple.
PS : Bon anniversaire, Julien !
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