La semaine dernière, je suis allé à Stockholm. Je suis intervenu auprès du siège d'une entreprise de haute technologie spécialisée dans la fourniture de solutions d'oculométrie. Mon rôle ? Faire apprécier à des revendeurs de cette technologie venant des quatre coins du monde des façons originales de vendre fondées sur l'utilisation métaphorique des succès clients.
Mes derniers souvenirs construits de Suède remontaient à il y a plus de 25 ans, alors que jeffectuais un stage d'étude pour le compte d'Air France. Depuis cette date, je n'y avais fait que des sauts de puce à l'exception notable d'une semaine passée au Fägelbrohus, dans l'archipel de Stockholm, au moment du solstice d'été de l'an de grâce 2008. Inoubliable, tant pour la sérénité du lieu que pour la finesse de la gastronomie !
Avant mon tout dernier déplacement de la semaine passée, l'image générale que j'avais de la Suède tenait en une petite phrase simple. C'était celle d'un pays austère et vaguement ennuyeux où de folles beuveries le week-end servaient de soupapes de décompression à la conduite d'une vie (trop) bien réglée. En clair, ça sentait bon le préjugé. Ca en avait en tout cas le caractère définitif et péremptoire.
Cette semaine, je dus réviser sérieusement mes idées sur le pays.
En me rendant chez mon client, j'eus en effet l'heureuse surprise de découvrir un environnement de travail où tout respirait le bien-être, le bonheur d'être ensemble et la recherche d'efficacité. Et ce sans la moindre contradiction dans les termes.
Comme nous étions mercredi, les salariés petit-déjeunaient ensemble dans la salle polyvalente servant aussi bien de bar-restaurant que d'espace de détente, voire de sport.
Le formalisme vestimentaire n'était manifestement pas de mise. Les sourires, eux, étaient radieux.
En me baladant dans les couloirs, je pouvais me faire rapidement une idée sur qui travaillait où et sur quoi. En prime, j'avais même une petite idée sur l'ambiance qui devait régner dans le bureau...
A un certain moment, juste derrière un splendide showroom où étaient mis en scène les produits & solutions commercialisées par la société, je longeai un grand mur parsemé de post-it de couleur. Ca sentait bon la séance de remue-méninges où, j'imagine, la créativité de chacun était mise à contribution pour atteindre un objectif collectif...
Alors que j'animais ma session, je remarquai que de nombreuses personnes venaient se servir un café au fond de la salle, restaient un petit bout de temps pour écouter ce qui se disait, puis repartaient vaquer à leurs occupations. L'ambiance était à la détente et à la bonhomie.
Quand je quittai mon hôte, j'étais heureux. Je venais de passer une demi-journée dans un espace où régnaient manifestement le bonheur de travailler ensemble. Je sortis le sourire aux lèvres, tout plein d'énergie. Pas étonnant que mon client fût numéro mondial dans son secteur d'activité ; ils avaient trouvé la martingale pour marier efficacité collective et gratification individuelle. Et je crois surtout qu'ils ne faisaient que mettre en pratique ce qui relève de l'évidence. C'est bien connu : là où il y a de la gêne, il n'y a pas de plaisir et sans plaisir, il est difficile de concevoir la possibilité d'un dépassement de soi...
En reprenant mon avion le soir même pour Paris, un voile de tristesse me traversa l'esprit. Je me disais que décidément, ce que je venais de voir était à des années-lumière de la façon dont est "pensé" le travail dans les deux pays où je passe le plus clair de mon temps en ce moment, à savoir la France et les Etats-Unis.
Le lendemain de mon retour en France, la presse se faisait l'écho de nouveaux suicides dans une grande entreprise de télécommunication. Quant aux Etats-Unis, il ne reste plus guère que le fameux Dilbert dans son célèbre cubicle pour nous faire rire de la façon dont son considérés les salariés dans nombre d'entreprises...
PS - Si vous voulez en savoir plus sur l'oculométrie sans vous prendre la tête, je vous invite à visionner une petite vidéo réalisée par mon client sous le parrainage du brasseur danois Carlsberg. C'est un rien décalé comme beaucoup de choses en provenance de Scandinavie, mais ça illustre pas mal du tout l'utilité opérationnelle du concept. C'est ici.
Un grand merci à Marie B. pour m'avoir alerté sur l'article excellent de Julien Tarby dans "Le Nouvel Economiste", intitulé "Le management sans état d'âme".
Article où sont parfaitement pointés du doigt les effets pervers d'un management à courte vue.
C'est ici : http://www.lenouveleconomiste.fr/management-gris/
Rédigé par : Jean-Marc | 05/10/2010 à 15:14