Il y a une semaine, alors que je me baladais dans les rues de Paris avec mon fils L., je tombai en arrêt devant ce pochoir de Miss.Tic. Les actes gratuits, ont-ils un prix... Voilà une belle question. En restant dans le clin d'oeil, j'aurais tendance à dire que la réponse dépend largement de qui les commet. Quelle considération donner à un acte gratuit réalisé par un vaurien ? Un acte d'un prix nul perprétré par un individu d'une valeur nulle... Vertige de la multiplication de zéro par zéro... Pour sortir de l'impasse, prenons un individu qui, comme pratiquement tout un chacun, s'alloue à lui-même une valeur non nulle. Imaginons maintenant que cet individu soit obsédé par l'acte gratuit. Nous sommes alors en présence du Lafcadio des Caves du Vatican, qui, lors d'un voyage en train décide de faire basculer dans le vide son voisin de compartiment, un parfait inconnu pour lui. Acte de liberté absolue, dénué de toute raison, de toute motivation... La gratuité, poussée jusqu'à l'absurde... Mais là encore, ne nous trouvons-nous pas en présence d'un vertige abyssal, où la pureté de l'acte se heurte brutalement à une laideur au moins égale en intensité ? Et qui dit vertige, dit absence de prix puisqu'il est bien connu que le prix est cette notion toute relative, cette frontière ténue où deux volontés se rencontrent pour réaliser un échange. Le prix à payer, comme acte de paix, comme pacte.
De là aussi peut-être l'insistance d'Abraham à refuser le cadeau d'Ephron qui veut lui donner la grotte de Makpela, ce lieu que le patriarche réclame pour offrir une sépulture à sa femme Sarah. Derrière l'obstination d'Abraham à payer le prix - et le prix fort qui plus est - ne faut-il pas voir l'idée de monnayer une paix que l'homme de Dieu souhaite éternelle pour sa femme et sa descendance ?
Alors si l'acte payant était un pacte, cela voudrait-il dire que l'acte gratuit porte en lui les germes du conflit, les effluves soufrés d'une guerre à venir ? Quand le sentiment de liberté absolue pousse un Pâris à enlever la belle Hélène, ne commet-il pas une transgression folle qui précipitera deux peuples dans une guerre effroyable ?
Le prix de l'acte gratuit serait-il la guerre ?
Ce n'est pas exactement ce que dit Lafcadio dans "Les caves du Vatican". Et dans "Crime et Châtiment", quand Raskolnikov tue sa "vieille", la gratuité est-elle dans son acte quelque part cachée ? De là à voir une liberté absolue et un acte gratuit dans l'enlèvement d'Hélène...
Rédigé par : Fatima Atkin | 23/05/2012 à 02:13