Chaque fois que j’anime une formation commerciale autour de la méthodologie CustomerCentric Selling®, je suis surpris de constater combien les participants ont du mal avec l’idée même de négociation. Pour une grande proportion d’entre eux, la négociation n’a lieu qu’en toute fin de cycle de vente, lorsqu’il s’agit de déterminer des conditions finales de la transaction. Alors bien sûr, quand j’évoque l’idée qu’il importe aux commerciaux de mettre en place les principes d’une négociation saine et équitable dès le premier échange avec un prospect, ils me regardent avec des yeux ronds.
En tout début de cycle de vente, le rôle du commercial consiste à susciter l’intérêt de son interlocuteur. Pour ce faire, il va proposer un échange que je pourrais résumer de la façon suivante : « Si je vous raconte une histoire potentiellement applicable à votre contexte, me parlerez-vous de vos propres enjeux ? » Il s’agit d’un échange information contre information.
Plus tard dans le cycle de vente, le commercial devra négocier un accès auprès des décisionnaires. Pour ce faire, il devra montrer patte blanche, soit en packageant l’information de telle sorte que sa qualité légitime un accès aux instances dirigeantes, soit en fournissant des éléments de preuve, comme par exemple une démonstration éclairante de la solution en jeu. Il s’agit ici d’un échange où l’octroi de ressources de la part du vendeur a pour contrepartie un accès à des interlocuteurs clés côté client.
Enfin, en fin de cycle, lorsque le commercial et son client négocient les termes de l’accord final, ils vont procéder à un échange de concessions. Le plus souvent l’octroi par le vendeur de conditions financières favorables en termes de rabais ou de délais de paiement trouvera sa contrepartie dans l’accès à de nouveaux interlocuteurs ou le fait que le client accepte d’agir comme référence. Cette fois encore, le commercial tentera d’obtenir de l’accès, de la ressource ou de l’information en échange d’avantages économiques, d’argent.
Le plus frappant dans cette histoire, c’est que si personne ne remet en cause l’idée de la négociation finale, bien nombreux sont les commerciaux qui trouvent l’idée de négociation incongrue avant. En général, ils estiment qu’avant la négociation finale, le commercial doit se plier de bonne grâce aux exigences du client. Si le client demande de la documentation, il faut la lui donner. S’il demande une démo, il faut la lui faire. S’il veut une proposition, il faut lui donner satisfaction. Et s’il veut une remise de dernière minute ou une ristourne des familles, alors là, non, il ne faut pas les lui donner ; il faut négocier. Quand j’entends ce genre de propos, je demande souvent : « mais comment pouvez-vous être un tant soit peu crédible à refuser une demande de rabais si, tout au long du cycle de vente, vous avez systématiquement consenti à l’ensemble des sollicitations de vos interlocuteurs ? »
Le plus souvent, ce qui se cache derrière cette conception étrange de la négociation renvoie à des stéréotypes, voire à des blocages mentaux. Au rang des stéréotypes, je rangerais le fameux « le client est roi » dont je ne répèterai jamais assez combien il a pu faire de mal à notre vision collective de l’économie. Les blocages mentaux, eux, font plutôt référence à un manque de… courage. Combien de fois n’ai-je pas entendu des phrases comme : « Mais si je demande l’accès à des dirigeants, est-ce que je ne cours pas le risque de me mettre à dos mes interlocuteurs habituels ? » ou encore « ma mission ne consiste-t-elle pas à faire plaisir à mon client ? »
Face à ces blocages psychologiques, les enseignements que je prodigue autour d’un savoir faire méthodologique sont certes importants, mais insuffisants. Importants, parce qu’ils permettent de mettre les choses en perspective, de justifier le pourquoi de la demande d’accès au pouvoir, d’en expliquer le bien-fondé. Mais insuffisants, car le fait de savoir quel comportement avoir ne présage en rien de la capacité à le déployer avec tout le savoir-faire et le doigté nécessaire.
C’est fort de ce même diagnostic, que mon ami Aurélien Gagnaire a mis au point une démarche originale pour aider les commerciaux à oser demander, à oser négocier. Il se sert de la boxe anglaise comme support pour faire sortir les vendeurs de leur zone de confort et les conduire vers un état sensoriel où, pleinement absorbés par la pratique des gestes à accomplir, ils font preuve d’une réceptivité hors du commun. Aurélien appelle cet état la position alpha. En position alpha, les commerciaux se trouvent en écoute totale ; les filtres habituels tombent. C’est le moment que choisit Aurélien pour énoncer ses mantras, des messages clés associés à la compétence qu’il cherche à développer ou la fausse croyance qu’il entend déboulonner. Au moment où sont prononcés les mantras, le commercial est en plein effort physique. Toute l’attention est requise par la pratique de l’exercice demandé, qu’il s’agisse de porter des coups virtuels à l’adversaire ou les esquiver. La garde psychologique est basse, ce qui permet une intégration plus forte du message et la création concomitante d’un réflexe. Le comportement voulu est durablement ancré dans le savoir-faire du vendeur.
Si d’un côté, la méthodologie CustomerCentric
Selling® met en évidence les gestes permettant d’accompagner le client dans son
processus de prise de décision d’achat, l’approche préconisée par Aurélien
Gagnaire a le mérite immense de désinhiber le vendeur dans la pratique de ces
gestes et notamment de ceux qui requièrent le plus de courage dans leur
exécution, comme la négociation de l’accès au pouvoir ou la demande de contrat.
A travers une démarche pédagogique innovante et en s’appuyant sur la boxe
anglaise comme prétexte et comme métaphore, Aurélien vient compléter les
apports de la méthodologie CustomerCentric Selling®. En aidant les commerciaux
à vaincre leurs peurs et à lever leurs blocages psychologiques, il leur donne
les moyens de libérer leur potentiel pour accéder à des niveaux de performance
inégalés. Et à l’image de ce que disait Sénèque, ils découvrent que : « ce n’est pas parce que les choses
sont difficiles que nous n’osons pas, mais parce que nous n’osons pas qu’elles
sont difficiles. »
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