Lorsque j’anime un atelier de formation à la vente complexe en m’appuyant sur la méthodologie CustomerCentric Selling®, je consacre un temps significatif à ce que je crois être la pierre angulaire de l’efficacité commerciale : le développement de la solution conceptuelle.
Je pourfends les approches traditionnelles reposant sur la présentation de caractéristiques techniques, l’abrutissement de l’audience à coup de diapositives PowerPoint ou encore les exposés prétendument didactiques. En particulier, je me mets en colère dès qu’un participant jouant le rôle du vendeur annonce « avoir la solution », ou qu’il se drape d’arrogance pour affirmer que « sa solution va permettre au client de gagner des millions d’euros ». Je m’arme de diplomatie pour faire découvrir aux participants que si c’est le client qui a un problème à résoudre, un besoin à satisfaire ou un objectif à atteindre, lui seul est légitime dans le fait de prononcer le mot « solution ». A l’inverse, un commercial s’appropriant l’emploi du mot « solution » usurpe son rôle et sa responsabilité dans l’interaction. Et je conclus mon propos en affirmant que la quintessence de l’art de vendre tient à la capacité du commercial de faire découvrir par son client les raisons le conduisant à acheter le produit ou service qu’il propose. J’appuie mes dires par une citation de Blaise Pascal tirée des Pensées, Chapitre 30 (274), 3ème paragraphe, selon laquelle « On se persuade mieux pour l’ordinaire par les raisons qu’on a trouvées soi-même, que par celles qui sont venues dans l’esprit des autres. »
J’eus récemment une confirmation aussi éclatante qu’inattendue de cette belle maxime lorsque, au cours d’un de ces ateliers de formation à la méthodologie CustomerCentric Selling®, Céline, une participante, vint me raconter comment elle s’appliquait durant le dressage des chevaux.
Comme toutes les proies, le cheval est un animal à vision latérale. Naturellement peureux, il déteste l’enfermement et rien ne lui déplaît plus que de devoir rentrer dans un van. L’espace devant lui est obstrué et les côtés du van lui renvoient l’image d’une paroi obscure, sans échappatoire.
C’est pourquoi, lorsqu’il y a lieu de faire voyager un cheval dans un van, il vaut mieux s’armer de patience. Le protocole, tel que me l’a raconté Céline est le suivant.
Les motivations du cheval sont simples ; en face d’une situation donnée, l’animal privilégie la recherche de la facilité et du confort. Par suite, pour l’amener à faire quelque chose qui lui répugne a priori – rentrer dans le van – il « suffit » de l'amener à trouver cette option plus désirable que toute autre se présentant à lui. Pour faire monter un cheval dans un van, il faut donc déjà ne pas être pressé et s’y prendre à l’avance. Il convient de montrer au cheval que loin du van, la situation est inconfortable : le dresseur le fait « travailler », lui demande de bouger les hanches, de se déplacer, de répondre à des exercices divers et variés pour le mettre en condition de « travail ». Dès qu’il s’approche du van, au contraire, le dresseur relâche la pression, créant par là-même une situation de repos et donc une perception de confort pour l’animal. A ce moment-là, le dresseur lui propose de monter dans le van, ce que le cheval, en général, commence par refuser. Dans ce cas, rien ne sert de s’énerver, il suffit de renouveler l’opération : le dresseur laisse le cheval s’éloigner et le remet au « travail », en le sollicitant par divers exercices. A nouveau, lorsqu’il s’approchera du van, le dresseur relâche la pression pour conforter chez l’animal l’idée que le van est l’option la plus désirable en l’état.
En répétant ce protocole plusieurs fois, toujours dans le calme, le cheval comprend petit à petit que sa zone de confort ne se situe pas en dehors du van, mais bel est bien à l’intérieur. Lorsque il se sera forgé cette conviction, il finira pas y monter de son plein gré, sans contrainte. Avec patience et méthode, le dresseur aura amené le cheval à trouver la solution – monter dans le van – sans la lui imposer.
En conclusion, Céline, fine mouche, me rappelle qu’il est aussi possible de faire monter un cheval dans un van en cinq minutes, en usant de la force et de la contrainte. Mais elle ajoute que dès lors que l’expérience de monter dans le van est associée dans l’esprit du cheval à une sensation douloureuse, ce dernier va développer des tactiques pour se soustraire à la contrainte. Autant dire que le temps « gagné » lors de la première instance, sera perdu au centuple lors des tentatives suivantes pour amener le cheval à monter dans le van. Par suite, prendre le temps (parfois plus d’une heure !) de faire monter le cheval via la méthode « douce » constitue un investissement initial dont le retour se manifestera dans la durée.
Patience et respect de l’intelligence du cheval : voilà ce qui caractérise le dresseur adroit. Patience et respect de l’intelligence du prospect : voilà ce qui – en application de la méthodologie CustomerCentric Selling® - caractérise le bon vendeur dans son aptitude exemplaire à laisser le client visualiser par lui-même une solution embarquant les produits et services qu’il commercialise.
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