Tout allait pour le mieux : après une série d’entretiens de qualification, vous aviez obtenu la validation de votre client comme quoi votre offre permettait de répondre à ses besoins. Vous aviez l’assurance que la valeur était clairement identifiée et amplement suffisante pour justifier l’investissement. Dans un souci d’exhaustivité, vous aviez pris le temps d’interviewer l’ensemble des bénéficiaires de l’utilisation de vos produits. Enfin, histoire de ne rien laisser au hasard, vous aviez dépêché un expert technique pour passer en revue l’ensemble des préoccupations de mise en œuvre. Vous aviez même obtenu un accord verbal pour travailler ensemble de la part d’un interlocuteur présentant tous les attributs externes d’un décideur. Vous vous étiez acquitté de l’obligation d’adresser votre proposition en vous disant qu’il s’agissait d’une simple formalité avant réception de la commande.
Oui, mais voilà. Depuis le moment où vous aviez adressé la proposition, tout semblait s’être déréglé. Malgré de nombreux appels à répétition de votre part, votre client répondait aux abonnés absents. Vous deveniez nerveux : la qualité de votre sommeil s’en ressentait et, aux dires de vos proches, vous étiez devenus extrêmement nerveux et irritable.
Si vous êtes un professionnel de la vente, cette situation ne vous est certainement pas étrangère. En tout cas, quand je l’évoque lors des ateliers de formation commerciale que j’anime, le visage des participants s’éclaire d’un sourire éloquent. Certains dodelinent de la tête, d’autres se crispent. Personne ne reste indifférent. Car nous avons tous rencontré cette situation douloureuse de perdre les pédales. Et pour ceux d’entre vous qui n’êtes pas dans la vente, croyez-moi, cette sensation soudaine d’abandon de contrôle est tout sauf drôle. On se croyait si près d’Ithaque… Et nous voilà replongés en pleine mer, sans le moindre rivage en vue.
Face à ce type de situation, je recommande de rompre avec la dynamique dans laquelle vous vous retrouvez engagé(e) à travers un acte à forte portée symbolique : le retrait de proposition, voire la rétractation totale.
Récemment, alors que je m’enquérais de l’efficacité de cette tactique de reprise de contrôle du cycle de vente auprès d’un client, Hugo me fit part du commentaire suivant :
« - Tu sais, certains clients peuvent prendre mal le fait de se voir retirée la proposition à l’initiative du vendeur. Ils y voient un geste d’arrogance. Voire, certains prennent la mouche et n’hésitent pas à te traiter d’aigrefin.
- Après les noms d’oiseaux pour désigner les commerciaux, c'est le tour des poissons maintenant…
- Alors, pour détendre l’atmosphère très glauque, très punk, je n’ai pas mis un Starshooter dans mon Blaupunkt[1], mais j’ai glissé un Purple Minion dans mon courriel de retrait de proposition.
- Mais de quoi me parles-tu, Hugo ? »
A ce moment, Hugo me montre un courriel adressé à un de ses clients récemment :
Dans le corps du courriel, il y avait une animation GIF où le Purple Minion sortait le grand jeu de l’effroi pour s’accaparer une banane tendue par un Minion. Je me mis à rire à gorge déployée.
Quand je lui demandai l’impact de cette approche, Hugo me répondit que cela marchait au poil : la touche d’humour permettait de dédramatiser la situation et le message de remise des compteurs à zéro passait parfaitement. Après un passage sans son sans image, le dialogue pouvait être renoué pour le plus grand bénéfice des parties.
Bien joué Hugo !
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[1] En référence aux paroles d’une chanson de Renaud intitulée « L’Auto-stoppeuse »
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