Certains mots sont vides de sens ; ils ne veulent strictement rien dire.
Strictement, par exemple.
Nous énonçons ou écrivons ces mots pour conjurer notre peur du vide. Angoisse de la feuille blanche, à l'écrit. Pesanteur du silence, à l'oral.
A moins que ce ne soit pour nous donner de l'importance. Il n'y a qu'à voir l'air de satisfaction réjouie affiché par certains après nous avoir gratifié d'un ergonomique bien pesé ou d'un agile pontifiant. Et quand, en plus, le mot provient du lexique anglo-américain, comme "scalable" (évolutif) ou "flawless" (sans faille), alors là, vous pouvez assister au spectacle édifiant d'un visage dilaté par les spasmes d'une jouissance orgasmique.
Depuis toujours, les interjections comme "euh" ou "hum" nous aident à gérer les pauses dans l'expression de notre pensée. Les fondateurs de notre belle langue ont eu l'élégance d'en faire des monosyllabes. Mais quand ces mots sont remplacés par des "effectivement" en cascade, je me dis que les temps heureux de la courtoisie et du savoir-vivre sont bel et bien révolus.
Quand il écrivait, Gabriel García Márquez (Gabo) s'efforçait d'éviter l'utilisation d'adverbes. Il savait que ces mots tuent l'imaginaire et inhibent les envols de la pensée.
Alors que dire quand l'adverbe - un très ou un vraiment, par exemple - vient en complément d'un adjectif, déjà porteur d'une opinion. A quoi vous font penser un prix très ajusté, ou un article vraiment pas cher ?
Et si vous appliquiez la règle de Gabo ? Et si vous expurgiez de votre expression les mots vides de sens ? La portée de votre message s'en trouverait décuplée.
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Note : ce billet est inspiré de l'article de Seth Godin intitulé "Meaningless". C'est ici.
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