Ceux et celles d'entre vous qui me connaissent ou me lisent l'ont sans doute remarqué : je suis toujours un rien suspicieux quant à l'apport effectif des technologies par rapport à un domaine métier donné.
La vente ne fait pas exception. J'ai toujours été scandalisé par les discours d'un optimisme béat laissant entendre que la performance des vendeurs serait multipliée par X du seul fait de la présence d'un SFA, CRM ou de tout autre logiciel à trois lettres.
Par un effet de myopie que j'ai encore du mal à comprendre, de nombreuses organisations acceptant de bonne grâce le discours de vendeurs sans scrupule ont joyeusement mélangé performance et automatisation de transactions.
Bon. Soyons juste. La mise en place ou l'utilisation en mode SaaS (Software-as-a-Service) de logiciels de SFA ou de CRM apporte des bénéfices bien tangibles aux organisations. C'est souvent à travers un Salesforce.com ou un Siebel que le management de l'entreprise peut suivre l'évolution de son portefeuille collectif d'opportunités et disposer d'éléments de réponse aux questions suivantes :
1. QUOI (Quelles opportunités ai-je dans mon portefeuille d'affaires en cours ?)
2. QUI (Quel commercial est en charge de ___ ? Qui est notre contact principal chez ____ ? Qui a la plus grande opportunité du trimestre ?)
3. QUAND (Quand cette opportunité doit elle se conclure ? Depuis quand est-elle dans le pipeline ?)
4. COMBIEN (Combien puis-je espérer signer à la fin du mois ? Combien de temps passe-t-on en moyenne pour signer une affaire ? Combien d'opportunités n'ont pas évoluer depuis le début du mois ?)
Répondre à ces questions est certes indispensable dans le contexte d'une saine gestion de son activité commerciale. C'est aussi très certainement un mieux par rapport à l'approche un rien brutale que j'ai pu connaître au contact de responsables commerciaux intéressés uniquement par le "QUAND" / "COMBIEN", approche si bien illustrée dans Gengarry GlenRoss.
Pourtant, avec le recul, tout le monde s'accorde à dire que les progiciels de CRM et de SFA n'ont pas changé la face de la terre en termes de performance commerciale. Les études les plus récentes de CSO Insight et de Sales Benchmark Index montrent que la variabilité reste toujours exceptionnellement forte puisque 1 commercial sur 4 ne génère même pas assez de CA pour financer le paiement de ses émoluments.
Alors... Qu'est-ce qui manque ? Tout bon journaliste vous dira que pour faire une brève, rendre compte des faits à travers l'évocation du QUI, QUOI, QUAND, COMBIEN constitue un pré-requis. Pourtant, il vous dira aussi, que pour passer de la brève à l'article, il importe de traiter les deux questions clés que sont le COMMENT et le POURQUOI.
Jusqu'à très récemment, j'avais tendance à considérer que ces questions trouvaient réponse dans la détermination d'un processus de vente spécifiant le COMMENT, c'est-à-dire la séquence de conversations que les commerciaux devaient avoir pour accompagner le client dans le franchissement des différents cycles émaillant son cycle d'achat. Et il faut dire que tant les études que mon expérience personnelle me fournissaient des résultats probants permettant de consolider cette vision.
Un doute me taraudait pourtant. J'observais dans bien des cas combien (même après une formation ad hoc) il était difficile pour les commerciaux de modifier leurs habitudes de travail et d'abandonner notamment le fameux "show up and trhrow up". Je constatais aussi que les managers commerciaux avaient du mal à sortir de l'archétype du père fouettard pour se transformer en incubateurs et développeurs de talents. Souvent, à ma plus grande désolation, je voyais les efforts déployés pour mettre en place un processus de vente sombrer dans l'oubli avec le temps ou -c'était peut-être encore pire- se transformer, une fois dûment intégrés au SFA ou au CRM, en amplificateur des mécanismes de flicage et de contrôle de l'activité des commerciaux. Sans réelle plue-value pour les intéressés.
Quelque chose clochait, résolument. Mais quoi ? A la suite d'une discussion récente avec Bertrand Duperrin, il m'est apparu qu'il y avait un grand hiatus dans tous ce dispositif. Que ce soit dans le contexte d'une mise en place de processus de vente conçu uniquement sous l'angle du management du pipeline ou de son automatisation à travers un progiciel de SFA ou de CRM, les vendeurs sont sollicités pour alimenter le système, mais sûrement pas considérés comme ses bénéficiaires. Il s'agit trop souvent d'un dispositif conçu en dépit de leurs attentes, quand ce n'est pas tout simplement à leur détriment.
Maintenant, que faut-il pour que les commerciaux se sentent les bénéficiaires du dispositif, pour qu'ils l'adoptent ? Il suffit tout simplement qu'ils puissent trouver leur compte d'informations à valeur ajoutée pour eux sur le COMMENT et le POURQUOI. Il importe qu'ils retrouvent reflétées dans le système d'information commercial les tactiques gagnantes face à tel concurrent, des aides pour conduire des conversations délicates comme le développement de solution, des conseils pour lâcher moins de discount en phase de négociation. Certes, le processus et la méthodologie qui le sous-tend apportent des réponses à ces interrogations. Mais il s'agit de réponses trop théoriques, à qui il manque la saveur inimitable du terrain. Et puis surtout, qui dit process, dit formalisme, alors que les commerciaux, fondamentalement, apprennent et progressent dans l'échange informel d'informations. Dans l'arsenal des technologies disponibles sous le chapeau Web 2.0, il en est une qui permet aux commerciaux de reproduire ou de continuer à l'écran ces échanges d'information informels. Il s'agit des réseaux sociaux d'entreprise, à l'image de ce que propose la société blueKiwi Software.
Je vois plusieurs bénéfices à l'inclusion systématique de cette brique dans le système d'information commercial. D'abord, à l'image de ce qu'apporte la mise en place du processus de vente, le réseau social permet de répondre aux questions COMMENT et POURQUOI. Ensuite, le réseau social humanise les informations gérées à travers le SFA ou le CRM. Aux données caractérisant une opportunité commerciale, le commercial peut désormais associer des fils de conversation retraçant les contributions multiples et protéiformes de tous ceux qui l'assistent dans sa mission. Enfin, en offrant aux commerciaux une tribune où ils puissent mettre en valeur leurs succès, leurs tactiques gagnantes tout comme leurs échecs ou leur incertitudes, le réseau social permet de contextualiser les apports méthodologiques liés au processus de vente dans l'univers des interactions réelles avec les clients ou prospects.
Agent d'humanisation d'un côté, agent de contextualisation de l'autre, le réseau social aide donc à replacer le vendeur au coeur du système d'information commercial/ Désormais, ce dernier n'est plus un simple pourvoyeur de données pour alimenter le système d'information ; il en devient son principal bénéficiaire.
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